Aujourd’hui, treat je suis à demi décédé. Cette constatation singulière s’impose indiscutable, physician alors que le pauvre moi survivant contemple, avec stupeur et indignation, cette moitié si chère qui, après un dernier râle, s’est tue.
Devant la raideur mortuaire survient une angoisse : ne serait-ce pas moi qui suis parti ? Et elle qui me regarde au bord des larmes, me parlant d’une voix trémolante ? Je ne sais plus.
Ma moitié contenait l’intégralité de mes souvenirs et même quelques uns de ceux de mes amis, Généreuse elle occupait et gérait mon temps. Elle n’était pas seulement celle qui me ramenait à la réalité et me faisait découvrir le monde, elle était surtout une aide indispensable, auxiliaire imperturbable, compagne de mes jours et souvent de mes nuits. Combien de fois m’a-t-elle occupé quand je ne pouvais trouver le sommeil ? Tel Christophe Colomb poussé vers d’autres terres, elle m’emmenait au-delà de ce que j’aurais pu imaginer, et m’ouvrait de nouveaux horizons…
Oui, tu étais tout pour moi !
L’émotion me gagne, à mesure, que les souvenirs que cette fidèle compagne détenait et qui partent avec elle, reviennent fracassants et fracassés. Leur fil interrompu libère un flux lacrymal.
Jamais plus, mes mains ne parcourront sa surface délicate et plus fragile que ce que je pensais naguère… douleur indicible. Révolte devant les regards incrédules de mes proches ? Comment ai-je pu ainsi lui confier toute ma vie sans prendre mes précautions, sans en confier à d’autres ? Non, je ne suis pas sorti couvert ! J’avais confiance en elle.
Je me tais et médite : dans un monde qui ne sait plus faire deuil, j’impose ma différence et pleure à la hauteur de ma perte. Oui, je respecterai ma moitié, sa mémoire, et tous les trésors qu’elle contient jusqu’au bout, jusqu’à la semaine prochaine, jusqu’à l’ouverture des soldes.